Il y a 150 ans, la Commune Dans la Nièvre

, par Eric

Si la Commune de Paris est connue dans le monde, il ne faudrait pas oublier les mouvements insurrectionnels et révolutionnaires qui ont touché une grande partie de la France de septembre 1870 à mai 1871.  [1]

Dans le cas du Nivernais, le poids de son passé, la présence ouvrière et ses voies fluviales sont prépondérants. La résistance au coup d’État de 1851, qui voit républicains, ouvriers et paysans se lever ensemble, reste dans la mémoire.
La Nièvre possède aussi de l’industrie métallurgique à Fourchambault, et minière à La Machine et, bien qu’en perte de vitesse, le commerce du flottage de bois par le canal latéral de la Loire et celui du Nivernais crée un lien étroit avec le Paris révolutionnaire .

La Charité-sur-Loire le 10 Avril

Les idées républicaines furent entretenues dans cette circonscription de la Nièvre,depuis 1848, en liaison d’ailleurs avec les républicains du Val d’Aubois ou de la Vauvise, dans le Cher, sur la rive gauche de la Loire, avec les «  Marianneux  » qui organisaient des rencontres et des banquets républicains.
Lors des banquets, de nombreux toasts étaient portés aux idéaux de la République, symbolisée par la figure de Marianne.

Le 10 avril, à La Charité-sur-Loire, selon le rapport de l’Enquête parlementaire sur l’insurrection du 18 mars :
A la Charité-sur-Loire, à Pouilly, des désordres ont éclaté dans les 1ers jours d’avril.
Le drapeau rouge avaient été promené par les rues, avec le concours de gardes nationaux en arme poussant les cris «  Vive la Commune , Vive Paris  ».

Plus loin, nous trouvons un certain nombre de gardes nationaux armés et précédés d’un tambour.
Le lendemain, les magistrats de Cosne-sur-Loire s’étaient transportés pour rechercher les coupables, furent menacés, obligés de se retirer et les détenus arrachés des mains de la gendarmerie.

Le Maitron nous livre quelques noms de ses communeux charitois :
Dalbret, Defleurs, P.E. Fressard, H. Lebrave, Ph. Maillot, P.Picard, Ricard F.

Simon Aucouturier, acheta de l’étoffe rouge avec laquelle il fit confectionner un drapeau qu’il apporta à la Garde nationale qui s’apprêtait à défiler.

Louis Normand, tonnelier, sergent de la Garde nationale, accompagna le drapeau rouge lors de la manifestation.
Le 11, il aidera à délivrer les manifestants arrêtés.

Hippolyte Favard (ou Favrard), tonnelier, opposant à l’Empire, promena le drapeau rouge, l’arbora à la mairie, puis l’emporta et le conserva chez lui.

Simon Maitron, Charitois, républicain libre penseur, qui était cordonnier à Paris, revint travailler chez son père, cordonnier lui aussi à La Charité.
Il fut rappelé à l’armée.
Il s’exila en Suisse.
Le 10 avril, il était à Genève avec cette pensée «  ne pas servir, même de nom, le gouvernement de Versailles.  »

Vierzon, commune aussi, tient la tête du chemin de fer pour empêcher les gendarmes de Versailles d’avancer contre Toulouse et pour aider les gardes nationaux de Limoges marchant vers Paris ... ».

De nombreux sympathisants de la Commune de Paris regrettent qu’il n’y ait pas de traces mémorielles de ces sympathies communeuses à la Charité.

Cosne-sur-Loire le 15 Avril

La résurgence des mouvements populaires dans le Nivernais

Dès août 1870, une émeute républicaine a lieu dans la Puisaye « rouge », avec le natif et futur membre de la Commune, Charles-Ferdinand Gambon.
Passé le 18 mars 1871, des manifestations répétées, où le drapeau rouge est souvent arboré, ont lieu en faveur de Paris :
ainsi à Cosne-sur-Loire durant plusieurs jours, où 300 personnes sont rassemblées sur la grande place, avec le rôle des cheminots, aux forges de Fourchambault et de Guérigny, et à Saint-Amand-en-Puisaye à nouveau.
Clamecy, contrairement à 1851, bouge peu, le métier de flotteur étant en déclin et le village du communard Jules Miot reste calme.
Dans l’enquête parlementaire, le préfet de la Nièvre rapporte :
« La succession de ces faits, tendant à faire de Cosne le centre d’un mouvement insurrectionnel, démontre jusqu’à l’évidence qu’il y avait réellement un complot. »
Aux côtés du préfet et de certains maires, des troupes de ligne et la gendarmerie procèdent à des arrestations préventives.
Rappelons que la Commune suivait les évènements de province :
Une des proclamations de la Garde nationale du 7 avril 1871 notait :
« Tout le Centre s’est levé pour suivre le mouvement. La Nièvre a ses hommes debout.  »
Entre l’autorité, qui surévalue le danger pour apeurer, et la Commune qui surestime une agitation non débutée, la réalité est palpable :
une petite partie de la population, mais en plusieurs endroits, reprend le chemin de l’opposition passée autour du drapeau rouge.

Charles-Ferdinand Gambon était une figure rassembleuse dans la Nièvre, surtout autour de Cosne-sur-Loire, avec son frère.
En 1872, il se présentera ainsi :
ancien magistrat - ancien représentant du peuple à la constituante et à la législative en 48 et 49, ex-représentant du peuple de Paris - membre de la Commune et du Comité de Salut Public ;
déporté en 49 par la république de Bonaparte ; fusillé (sic) en 71 par la république de Thiers, et condamné aux galères et à la dégradation civique par le 6e conseil de guerre de Versailles (20 ans de galères pour la démolition de la maison Thiers - attaque à la propriété)

Sa devise : dis ce que pense - fais ce que dis - advienne que pourra.

Les sympathisants et émissaires de la Commune, en mai, se réunissaient « au café de la paume  » rue de Nemours, à Nevers, abri de la loge maçonnique « les amis du travail ».


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