Inflation, Pouvoir d’Achat, SMIC Respecter le rôle des interlocuteurs sociaux

, par Eric

La véritable petite histoire (actuelle) entre inflation, pouvoir d’achat, hausse du SMIC et des salaires, le partage de la richesse produite et du coût de l’inflation entre classe dominante et ouvrière. (partie 5/6)

Lors du Comité de suivi des salaires qui s’est tenu en juillet dernier, le Ministère du Travail a indiqué qu’au 1er juillet 2022, 112 branches sur les 171 branches de plus de 5 000 salariés du secteur général étaient non conformes au SMIC, soit plus de 65% d’entre elles.

La dernière revalorisation du SMIC intervenue le 1er août 2022 a conduit à ce que de nouvelles branches se retrouvent dans la même situation.
Elles seraient désormais 75%. Or, aucune mesure réellement incitative n’est prévue pour stopper cette situation et les négociations atteignent des situations de blocage sans précédent.

L’article L 2241-10 du Code du travail prévoit certes une obligation de négociation de branche sur les salaires dès lors que les minima de la branche se retrouvent en dessous du SMIC, mais l’obligation se limite à une simple obligation de négocier, et non de parvenir à un accord.

Parfois, établir et utiliser le rapport de force est un bien nécessaire !

De plus, si la loi « Pouvoir d’achat » a ajouté la non-conformité de la branche au SMIC comme élément à prendre en compte dans le cadre de la procédure de restructuration des branches, reste à savoir comment l’administration du travail va se saisir de cette nouvelle rédaction.

Il est très peu probable qu’elle décide de restructurer toutes les branches non conformes au SMIC, surtout à l’heure actuelle, il n’en resterait en effet plus beaucoup.
Surtout, il ne faudrait pas non plus que ces nouvelles dispositions permettent des restructurations arbitraires de branche.

En tout état de cause, l’UD FO rappelle que la liberté de négociation se matérialise par la liberté de signer ou de ne pas signer d’Accord.

La menace d’une restructuration des branches ne doit pas venir entraver les négociations.
En revanche, afin de stopper l’érosion du pouvoir d’achat des salariés dont les salaires conventionnels sont rattrapés par le SMIC, l’UD Force Ouvrière revendique d’imposer la conditionnalité des exonérations de cotisations sociales à la conformité de la branche au SMIC.   De plus, les écarts hiérarchiques issus des grilles de classification sont les seuls garants de la prise en compte des différents niveaux de qualification et d’un véritable déroulement de carrière pour de nombreux salariés, notamment dans les PME et les TPE.

Or, le phénomène dit de « tassement des grilles » a explosé et le resserrement de l’éventail moyen des salaires s’est accentué, notamment en raison de l’indexation de l’évolution des salaires au niveau des prix, limitée au seul SMIC, et non à l’ensemble des grilles salariales.

Pour l’UD Force Ouvrière, il est donc urgent de réintroduire le mécanisme « d’échelle mobile des salaires » et que leur pleine liberté contractuelle soit rendue aux interlocuteurs sociaux.

A l’heure actuelle, en vertu de l’article L 3231-3 du Code du travail, sont toujours prohibées dans les conventions ou accords collectifs de travail, les clauses comportant des indexations sur le SMIC ou des références à ce dernier en vue de la fixation et de la révision des salaires prévus par ces conventions.
Le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a, à ce propos, écarté le 2 novembre dernier, toute indexation des salaires sur l’inflation afin « d’éviter la spirale inflationniste qui avait été provoquée dans les années 1970 par une augmentation générale et automatique des salaires totalement découplée de la productivité du travail  ».

Cette récurrente crainte d’une « spirale inflationniste de la boucle prix-salaires » masque en réalité le véritable problème :
l’appauvrissement des salariés du fait du décrochage de leurs revenus par rapport à l’évolution des prix.

Ainsi, en raison de la hausse des prix, l’INSEE a déjà annoncé une baisse du pouvoir d’achat par unité de consommation de 1,8 % au premier trimestre 2022 et de 1,2% au deuxième.

Plus frappant encore, le pouvoir d’achat du salaire mensuel de base (SMB) a baissé de 2,3% au premier et de 3% au deuxième trimestre selon la DARES.

Dans le même temps, la négociation interprofessionnelle sur le partage de la valeur, sujet sur lequel le ministre du Travail Olivier Dussopt a invité les interlocuteurs sociaux à négocier en septembre 2022, a été lancée le 8 novembre.
Dans le document d’orientation accompagnant l’invitation à négocier, le ministère du Travail a entendu fixer un cadre restreint à cette négociation, centrée essentiellement sur la généralisation, le renforcement et la simplification des « dispositifs de partage de la valeur », notion réduite par le gouvernement aux mécanismes d’épargne salariale et d’actionnariat salarié.

Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a également appelé les négociateurs à réfléchir « rapidement  » à la mise en place d’un mécanisme de « dividende salarié  » et a d’ores et déjà tenté d’écarter tout débat autour d’une négociation portant sur la hausse générale des salaires ou du SMIC.

Cette prise de position du ministre de l’Économie avant même l’ouverture la négociation de l’ANI sur le Partage de la valeur n’est pas sans rappeler le désintérêt du gouvernement vis-à-vis des interlocuteurs sociaux dans le cadre la Commission Nationale de la Négociation Collective, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (CNNCEFP).

Ces dernières années, la décision de s’en tenir à la stricte augmentation mécanique du SMIC — donc ne pas procéder à un coup de pouce — a en effet été prise après consultation du groupe d’experts sur le SMIC, sans que les revendications des organisations syndicales n’aient jamais été prises en compte.

Pour l’UD Force Ouvrière, il est inacceptable que le gouvernement s’en tienne à la seule position prônée par le groupe d’experts pour considérer l’opportunité des réévaluations du salaire minimum.   Selon nous, l’indépendance et l’objectivité du groupe d’experts sont des conditions indispensables pour que le travail mené soit fructueux et constructif.

L’UD Force Ouvrière regrette l’absence systématique de prise en compte de points de vue contradictoires dans l’élaboration des rapports du groupe d’experts SMIC.
Ces derniers n’ont en effet cessé, année après année, de faire état d’une très forte hostilité à l’égard du SMIC, et vont même jusqu’à remettre en cause le mécanisme de revalorisation automatique, qui a pourtant démontré son impérieuse nécessité !

L’obligation, depuis 2013, de consulter les organisations syndicales préalablement à la remise des rapports, ainsi que le fait de publier leurs contributions respectives, devait garantir un certain pluralisme.

Or, les rapports préconisent inlassablement les mêmes recommandations. Il n’y a donc pas eu, comme nous l’espérions à l’époque, « de nouveau souffle  » dans la réflexion sur le SMIC, du fait de la prise en compte d’opinions divergentes.

L’UD FO constate que la consultation de ce groupe par les pouvoirs publics se substitue à une consultation effective et sincère des interlocuteurs sociaux (confédérations syndicales et organisations patronales).
Or, il faut redonner la place qui est la sienne à la CNNCEFP, plutôt qu’à un groupe d’experts mono-colore et mono-message depuis plus de 12 ans.

C’est pourquoi l’UD FO demande la suppression de ce groupe d’experts et la mise en place une véritable consultation des interlocuteurs sociaux avant toute réévaluation du SMIC.

De plus, la directive relative à « des salaires minimaux adéquats dans l’Union européenne » adoptée le 19 octobre 2022 exige clairement une participation effective - et en temps utile - des organisations syndicales de salariés et d’employeurs à la fixation et à l’actualisation des salaires minimaux légaux.

Elle recommande également le recours à des mécanismes d’indexation et vise comme premier critère pouvant être pris en compte pour la fixation et l’actualisation des minima « le pouvoir d’achat des salaires minimaux légaux, compte tenu du coût de la vie ».

Ainsi, la suppression du groupe d’experts s’impose d’autant plus que la France est désormais liée par cette directive.

Si, certains, prônent, désirent, encouragent des dirigeant autoritaires, il ne faut pas s’étonner du délitement de la démocratie sociale, mais aussi générale.

Le syndicalisme libre et indépendant que constitue Force Ouvrière ne peux s’accommoder avec n’importe quel autoritarisme et d’où qu’il provienne !

L’autoritarisme est le terreau sur lequel prospère une crise profonde de légitimité…

Toute crise démocratique est étroitement liée à la crise du capitalisme fou, d’on nous subissons chaque jour les méfaits !

Ce qu’un siècle de luttes ouvrières avait réussi a faire entrer dans la conscience des hommes, la nécessité du partage, a volé en éclat en quelques années pour rétablir ce fléau mondial :
la volonté de certains de posséder ce que les autres possèdent !


Un Partage de la Valeur centré sur des Primes Ponctuelles, Défiscalisées et Désocialisées 4) <- -> 6) Nos Revendications !